Les cardinaux assistent à une messe un jour après les funérailles du pape François, sur la place Saint-Pierre au Vatican, le 27 avril 2025. (©DAMIEN MEYER / AFP)
“Un pape africain? Ce serait une décision sans précédent qui améliorerait d’autant plus la perception de l’Église en remettant en question l’idée que l’Afrique est négligée dans les décisions ecclésiales”
En remontant le cours de l’histoire de l’Eglise, Il faut souligner qu’il y a eu au moins trois papes d’originaire berbère d’Afrique : Victor 1er 14e pape, Miltiade 32e pape et Gélase Ier – 49eme pape de l’Église catholique de 492 à 496 – est mort il y a plus de 1 500 ans. Le décès du pape François a ravivé l’espoir de voir un africain noir accéder à la tête de l’Église catholique. Il est grand temps, selon beaucoup, d’en avoir un autre.
Et les candidats pour succéder à François ne font pas défaut. Parmi eux, trois cardinaux africains sont souvent mentionnés. Il s’agit du Ghanéen Peter Turkson, 76 ans, archevêque de Cape Coast, du Congolais Fridolin Ambongo, 65 ans, archevêque de Kinshasa et du Guinéen Robert Sarah, 79 ans, archevêque de Conakry. Mais quelles probabilités ont ces prélats africains de contrecarrer les pronostics pour accéder au siège de Saint-Pierre ? La question est d’autant plus pertinente puisque, bien que ces leaders religieux africains soient sur la liste des prétendants au trône papal, ils ne sont pas en tête des favoris. En effet, en termes de renommée et d’influence au sein de l’assemblée mondiale, ils ne semblent pas mieux lotis que certains de leurs homologues européens, qui sont également des candidats sérieux.
De plus, le fait de ne pas occuper des postes majeurs au Vatican semble constituer un frein pour les prélats africains. En effet, bien qu’il soit une chose d’avoir le profil requis répondant aux critères d’éligibilité, il en est une autre d’avoir une véritable assise en matière de pouvoir au sein de l’appareil de l’Etat du Vatican. Ce qui n’est pas le cas pour les prélats africains. Et puis, aussi pertinente que la question puisse sembler, on peut se demander si, en dehors du pape François, le Vatican, qui a toujours été un bastion pour les prélats européens, est vraiment prêt à céder son trône à un Africain. Pourtant, l’Afrique possède de nombreux atouts. À commencer par la population de ses fidèles, qui affiche la croissance la plus rapide au monde. Selon les données du Vatican, en 2022, près de 20 % des catholiques dans le monde résidaient sur le continent noir. Des chiffres en constante augmentation.
Malgré que le pape François ait fait passer la proportion de cardinaux originaires d’Afrique subsaharienne qui voteront pour son successeur de 9 % lors de son élection en 2013 à 12 % en 2022. Je pense que les cardinaux choisiront probablement quelqu’un qui a déjà une grande notoriété quelqu’un qui est déjà une voix influente.
Le problème, c’est qu’aucun membre du clergé africain n’occupe aujourd’hui de poste important au Vatican, ce qui pose problème. A mon avis, s’il est important de nommer les hommes, celui qui les choisit et les nomme devra aussi leur donner le poids et la valeur en leur confiant les tâches importantes et les laisser faire dans la dignité. La manière dont le continent africain et l’Église catholique en sont arrivés là surprend compte tenu de l’ouverture du pape François à l’égard de l’Afrique. Or si l’on pense aux cardinaux africains qui sont des papes potentiels, personne parmi eux occupe une place importante dans le catholicisme mondial aujourd’hui.
Rappelons que cette situation contraste avec celle de 2005, le cardinal nigérian Francis Arinze fut un candidat potentiellement farouche lors du conclave qui conduisit à l’élection du pape Benoît XVI. En 2013 le cardinal ghanéen Peter Turkson fut aussi un candidat sérieux au siège de Pierre. En un mot, Il y a toujours cette question du racisme dans l’Église dont nous ne parlons même pas. C’est que le Théologien Cyprien Melibi désigne par le vocable de « racisme ecclésiastique ». Dans ce sens les médias européens sont en train de faire du Sarah bashing.
Dans la lettre aux Romains 13,1, saint Paul nous enseigne que « toute autorité vient de Dieu, et celles qui existent ont été établies par Dieu ». C’est pourquoi les catholiques croient que Dieu, le Saint-Esprit, aide à choisir les dirigeants de l’Église. Cela signifie qu’il pourrait y avoir une surprise, comme en 2013 lorsque le pape François a été élu. Il n’était pas celui que tout le monde prédisait. Il faut toujours garder l’espoir de voir un noir africain pontife romain.
Pour conclure, il importe que, suite à un pape qui a montré une grande sensibilité aux enjeux africains, l’Afrique espère que le futur pontife ne se limitera pas à être un porte-parole par intérim. Elle souhaiterait qu’il soit son véritable représentant, puisqu’il provient de ses entrailles. Quoi qu’il en soit, ce serait une décision sans précédent qui améliorerait d’autant plus la perception de l’Église en remettant en question l’idée que l’Afrique est négligée dans les décisions ecclésiales. Cela contribuerait à contredire certains stéréotypes qui alimentent le pessimisme d’un grand nombre d’Africains, persuadés que l’éventualité qu’un de leurs occupe un jour le trône de Saint-Pierre est peu probable. Il est vrai que cette décision pourrait encore stimuler la croissance du christianisme sur le continent africain.
Peu importe d’où l’on vient, dès que l’on est élu, les problèmes de tout le monde deviennent les siens. L’élu n’a qu’une seule préoccupation : construire le corps du Christ, où que soient les gens, quel que soit leur nombre, quel que soit le contexte dans lequel ils se trouvent. La chose la plus importante est que le pape soit le principal théologien et pasteur de l’Église.
Don Désiré Ayina,
Prêtre et théologien de la théologie morale et pastorale
“L’Église a besoin d’un leader capable de concilier tradition et modernité, de promouvoir la paix et la justice, et de guider l’Église vers un avenir radieux… un phare qui guide les âmes à travers les tempêtes du monde moderne”
L’Afrique, terre de soleil et de vie, berceau de l’humanité, pourrait bientôt voir l’un de ses fils prendre les rênes de l’Église catholique, guidant les fidèles vers un avenir radieux. Avec plusieurs cardinaux influents représentant le continent au sein du collège cardinalice, l’élection d’un pape africain n’est plus une utopie, mais une possibilité qui prend forme dans les coulisses de l’histoire.
Mais au-delà de la fierté que cela représenterait pour les Africains, l’Église a surtout besoin d’un pape capable d’unir ses fidèles, un leader “orthodoxe” qui transcende les clivages entre libéraux et conservateurs, un phare qui guide les âmes à travers les tempêtes du monde moderne. Un pape qui, conscient de son rôle de successeur de saint Pierre, saura guider l’Église avec sagesse et discernement, en naviguant habilement entre les défis du monde moderne et les traditions de l’Église, comme un navigateur expérimenté qui lit les étoiles pour trouver son chemin.
L’Afrique a des cardinaux de haut niveau, reconnus pour leur dévotion, leur leadership et leur engagement en faveur des communautés les plus vulnérables, des hommes qui portent en eux l’esprit de l’Évangile et la compassion de Jésus-Christ. Mais la question n’est pas de savoir si le prochain pape sera africain, mais plutôt si l’Église trouvera le leader dont elle a besoin pour relever les défis du monde moderne, pour répondre aux attentes des fidèles et pour continuer à jouer un rôle significatif dans la société, comme un phare qui éclaire les ténèbres.
Un leader capable de concilier tradition et modernité, de promouvoir la paix et la justice, et de guider l’Église vers un avenir radieux, où les fidèles puissent trouver la lumière et la vérité. Un leader qui saura écouter les murmures du cœur, qui saura comprendre les attentes des fidèles et qui saura répondre aux défis du monde moderne avec sagesse et discernement.
L’avenir est incertain, mais une chose est sûre : l’Église a besoin d’un leader qui saura la guider vers un avenir radieux, un leader qui saura unir les fidèles et promouvoir la paix et la justice dans un monde qui en a tant besoin. Le mystère de l’avenir est profond, mais avec la foi et la détermination, l’Église continuera à avancer, guidée par les étoiles de l’espérance et de l’amour.
Je pense qu’il revient à l’Église, d’être tout d’abord consciente de la place qu’elle occupe dans le monde, et de son rôle dans la transmission du message divin.
Il est bienvenu de se détacher des réflexions sur la provenance ou la race du futur Pape pour l’Eglise catholique romaine. Ce qui devrait nous intéresser, ce sont les qualités et les valeurs que doit incarner le successeur de Saint Pierre. l’Église doit d’abord se réapproprier son identité. Il est malvenu de croire que l’Église doit s’adapter à l’ère des temps. Que non ! Elle doit rester la source à laquelle viennent s’abreuver tous les courants idéologiques. Lorsque l’Église n’inspire plus, elle nourrit les gènes de sa destruction, de sa dénaturation. Bref, l’Église qui s’identifie aux courants du monde, se pervertit. Si la modernisation, la mondialisation ou la globalisation guident les orientations de l’Église, alors, cette dernière perd sa substance originelle et devient “un machin”.
Notre Eglise est aujourd’hui confrontée à des défis qui menacent sa mission première. Bon nombre des serviteurs de l’Eglise, au lieu de se consacrer à la proclamation de l’Évangile et à la guidance spirituelle des fidèles, se sont laissé entraîner dans des activités politiques et sociales qui les éloignent de leur rôle de prophètes. Ces serviteurs, au lieu de parler avec courage et vérité, semblent désormais influencés par des lobbies et des hommes politiques qui les soutiennent. Ils ont perdu leur capacité à proclamer avec assurance ” En nul autre que Lui, il n’y a pas de salut “, parole qui devrait être au cœur de leur ministère.
Aussi, suis-je en droit de m’interroger si le créateur dans son immensité, son omniscience et son omnipotence devrait s’identifier aux évolutions perverses de sa créature qu’est l’homme ? La question sur les qualités du Pape relève d’une Église en proie aux errements, une Église qui plonge ou sombre petit à petit dans le doute et l’incertitude.
L’Église catholique romaine est la plus vieille institution qui a résisté aux affres des époques. Lorsque l’Église décide de se mettre en marge des atrocités des politiques, elle se corrompt et s’amoralise. Comme dira-t-on, l’Église et la politique ne font pas bon ménage. Le Pape dont l’Église a besoin est celui-là qui assume la dénonciation, l’annonciation et la prononciation.
Abbé Zéphyrin Belibi,
Curé paroisse saint Pierre Claver de Nlong, Diocèse d’Obala-Cameroun