Entre nostalgie et renouveau, les pays nordiques réévaluent ce qui fonde leur identité culturelle. En Suède, le débat autour d’un « canon culturel » exclusif relance la question : comment préserver le patrimoine sans effacer la créativité contemporaine ?
Dans les pays nordiques, la culture n’est jamais figée : elle se questionne, se redéfinit, s’ouvre et parfois… se divise. Ces dernières semaines, la Suède a vu éclore un débat inattendu autour de son « canon culturel », une liste officielle de 100 œuvres censées représenter l’essence de la culture suédoise. Surprise : le groupe ABBA et toute création postérieure à 1975 ont été écartés. Une décision qui a fait bondir artistes, journalistes et citoyens, révélant une fracture entre patrimoine institutionnalisé et culture populaire vivante.
Tradition ou exclusion ?
Les défenseurs du projet y voient un outil pédagogique, destiné à préserver les fondations de la culture nationale. Mais pour beaucoup, ce choix traduit surtout une nostalgie sélective : celle d’un âge d’or qui exclut la diversité et la créativité contemporaine.
« On ne peut pas définir la culture en effaçant quarante ans d’histoire musicale, littéraire et artistique », a commenté une critique suédoise, rappelant qu’ABBA, Roxette ou encore les auteurs nordiques modernes ont façonné l’image mondiale de la Suède.
L’innovation comme réponse
Pendant que la Suède débat de son passé, le Danemark célèbre son futur. Lors du festival 3 Days of Design à Copenhague, les créateurs nordiques ont exploré de nouvelles façons de conjuguer esthétique, durabilité et inclusion. Les studios danois y ont présenté des pièces qui questionnent la production de masse, prônent la transparence des matériaux et revisitent l’artisanat scandinave à travers une sensibilité écologique et sociale.
Ce mouvement prouve que la culture nordique n’est pas seulement une question d’héritage, mais aussi d’innovation responsable.
Nouvelles scènes et renouveau artistique
En Suède, plusieurs projets témoignent de ce souffle créatif. Un centre dédié à Hilma af Klint doit ouvrir sur l’île d’Adelsö en 2025, offrant un espace d’exposition et de réflexion autour de son œuvre mystique et visionnaire. Dans le même temps, de jeunes photographes surréalistes exposent à Götene, transformant des paysages familiers en mondes imaginaires.
L’art nordique, loin d’être monolithique, explore aujourd’hui l’intime, le spirituel et le durable avec une liberté retrouvée.
Une identité en mouvement
Entre la tentation du repli patrimonial et l’élan de la modernité, les pays nordiques se trouvent à un moment charnière. Le débat suédois sur le canon culturel soulève une question universelle : comment préserver la mémoire collective sans figer la création ?
Les réponses semblent se dessiner dans les ateliers, les galeries et les festivals : en laissant la culture respirer, évoluer et refléter la société telle qu’elle est multiple, curieuse, audacieuse.

