Qui est à l’origine de la plainte ?
C’est l’organisation suédoise Utgivarna qui regroupe plusieurs grands médias suédois, dont SVT, Sveriges Radio (SR), TV4, ainsi que des associations de presse magazine et de presse écrite qui a formellement déposé plainte pénale contre Mark Zuckerberg, dirigeant du groupe Meta Platforms.
La plainte accuse Meta et son CEO de « bluffannonser » c’est-à-dire des publicités mensongères ou frauduleuses diffusées sur ses plateformes sociales. Selon Utgivarna, ces annonces exploitent de manière abusive l’image de médias reconnus et de journalistes suédois, trompent des citoyens, et causent des dommages à la fois économiques et psychologiques.
Quelles sont les accusations précises ?
Dans le dépôt de plainte, Utgivarna invoque plusieurs chefs d’accusation :
- Escroquerie (fraud / bedrägeri), complicité d’escroquerie et préparation à l’escroquerie : des publicités frauduleuses qui promettent des gains, des investissements ou des produits, mais qui mènent à des pertes pour des victimes.
- Usage non autorisé de nom et d’image dans la publicité : des personnalités médiatiques suédoises — parfois des journalistes ou présentateurs — sont utilisées (via leurs noms, visages ou logos de médias) dans ces annonces fictives, sans leur consentement.
- Violation des droits de marque / droits d’auteur / contrefaçon de logos : des logos de médias suédois (SVT, TV4, etc.) sont détournés pour donner l’apparence de vraies publications, trompant ainsi les internautes.
Utgivarna considère que ces pratiques ne sont pas de simples erreurs ponctuelles, mais font partie d’un phénomène systémique toléré — ou insuffisamment combattu — par les plateformes de Meta.
L’ampleur du phénomène : pertes, victimes, profits
Selon le communiqué de Utgivarna, plus de 5 000 Suédois auraient vu leurs économies s’envoler durant l’été 2025 à cause de ces « bluffannonser » — pour un montant total d’environ une demi-milliard de couronnes suédoises.
Du côté des revenus de Meta, l’affaire prend une dimension internationale : toujours selon Utgivarna et relayé par Reuters près de 10 % des recettes annuelles de Meta en 2024 proviendraient de ces publicités frauduleuses.
Ces chiffres soulignent le paradoxe : alors que les victimes subissent des pertes, la plateforme tirerait un profit direct de ces arnaques, ce qui alimente la colère des médias suédois et la peur d’une banalisation des escroqueries via des canaux numériques.
Pourquoi cette plainte change la donne pour les médias et l’information
Pour Utgivarna, ce n’est pas qu’une question financière ou judiciaire — c’est une question de démocratie et de confiance. L’organisation affirme que ces annonces frauduleuses portent atteinte à la crédibilité des médias, minent la confiance du public dans le journalisme, et créent un terrain favorable à la désinformation.
De plus note l’organisation Meta ne semble pas mobiliser suffisamment de ressources pour modérer efficacement le contenu frauduleux. Les alertes répétées des médias n’entraînent pas, selon eux, des mesures concrètes.
En déposant une plainte pénale, les médias suédois entendent forcer la main de Meta et provoquer un débat public et juridique sur la responsabilité des plateformes non seulement en matière de modération de contenu, mais aussi sur la régulation des revenus issus de publicités frauduleuses.
Comment Meta réagit ?
Selon les informations disponibles, Meta affirme éliminer les publicités ou comptes frauduleux chaque fois qu’ils sont détectés. Dans un courrier adressé à un média suédois, l’entreprise affirme que l’usurpation d’identité de personnes ou de marques est contraire à sa politique, et promet de supprimer ces contenus lorsqu’ils sont signalés.
Cependant, pour les médias suédois, cette réponse est insuffisante — ils dénoncent un “laisser-faire” : la modération serait inadéquate, les faux continueraient à prospérer, et Meta profiterait toujours des revenus publicitaires liés à ces arnaques.
Enjeux à venir : ce que cette plainte peut changer
- Responsabilité juridique et morale de Meta : si la plainte aboutit, cela pourrait ouvrir la voie à des poursuites contre Meta ou ses dirigeants, en Suède — et potentiellement inspirer d’autres pays.
- Pression sur la modération et la transparence : les médias exigent que Meta rende public le nombre d’annonces frauduleuses, les revenus associés, et le nombre d’employés ou de modérateurs travaillant sur ce problème.
- Réforme législative ou réglementaire : l’affaire pourrait nourrir des demandes de renforcement des lois contre la fraude en ligne, la contrefaçon de marques et l’usurpation d’identité.
- Impact sur la confiance dans l’information : en jetant une lumière sur ces dérives, les médias tentent de restaurer la confiance du public et de préserver l’intégrité du journalisme face aux escroqueries numériques.
La plainte déposée par Utgivarna contre Mark Zuckerberg marque un tournant ce n’est plus seulement un débat sur la modération de contenus, mais une attaque en règle contre le modèle économique et éthique de Meta. En accusant de fraude, d’usurpation d’identité et de complicité de crime, les médias suédois prennent un risque majeur, mais entendent défendre la confiance, la transparence et la sécurité des internautes.


