Le 14 octobre 2025, le gouvernement suédois a officiellement proposé Jesper Brodin, actuel PDG du groupe Ingka (filiale qui contrôle la majorité des magasins IKEA), comme candidat pour le poste de Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR / HCR).
Cette nomination est jugée audacieuse voire surprenante car elle fait sortir des sentiers battus le profil traditionnel des chefs d’ONG ou de diplomates pour placer à la tête d’une agence humanitaire un acteur privé avec une forte expérience de management international.
Pourquoi ce choix ? Les arguments avancés
1. Crise financière au HCR & défi budgétaire
- L’UNHCR traverse une situation financière difficile : des donateurs majeurs en particulier les États-Unis et certains pays européens ont fortement réduit leurs contributions.
- L’agence prévoit de devoir réduire son budget d’environ 20 % pour l’année à venir, ce qui impliquera également une réduction des effectifs (déjà 5 000 postes supprimés) et la fermeture de certains bureaux.
- Dans ce contexte, la Suède met en avant la nécessité d’un leadership capable de « tenir les cordons de la bourse » et de garantir une gestion rigoureuse et efficiente.
2. Expérience managériale & réseau international
- Brodin cumule une longue carrière chez IKEA (plus de 30 ans), avant de diriger Ingka Group, une organisation mondiale avec des opérations dans de nombreux pays.
- Il affirme avoir déjà collaboré avec le HCR, notamment en Jordanie (camps de réfugiés syriens) et dans le contexte du conflit en Ukraine, en promouvant des programmes d’emploi pour réfugiés.
- IKEA / Ingka a par ailleurs noué des partenariats avec le HCR pour favoriser l’inclusion économique des réfugiés : depuis 2019, le groupe a soutenu plus de 3 700 réfugiés dans le développement de compétences à l’emploi, via un outil « Skills for Employment ».
- La Suède considère que les compétences du monde des affaires (gestion, optimisation, partenariats public-privé) peuvent renforcer l’efficacité du système des Nations unies dans un contexte de contraintes budgétaires.
3. Une rupture de profil — entre opportunité et défi
- La désignation d’un dirigeant d’entreprise à la tête d’une agence humanitaire est inhabituelle, ce qui suscite à la fois intérêt et interrogations.
- Certains observateurs estiment qu’un tel profil pourrait remettre en question les dynamiques internes de l’ONU ou les priorités habituelles des agences humanitaires — notamment en matière de plaidoyer, de principes humanitaires ou de neutralité.
- Le futur Haut-commissaire aura à gérer non seulement la crise financière, mais aussi la pression politique sur les questions migratoires, le droit d’asile, et les critiques croissantes dans de nombreux pays autour de la question des flux de réfugiés.
Le calendrier et les concurrents
- Le mandat actuel de Filippo Grandi à la tête du HCR prend fin à la fin de l’année.
- Le processus de sélection prévoit que le Secrétaire général de l’ONU proposera un ou plusieurs candidats, qui devront ensuite être approuvés par l’Assemblée générale des Nations unies (193 États membres).
- D’autres candidats reconnus se manifestent déjà, notamment des diplomates, d’anciens ministres de l’immigration ou des responsables issus du secteur public.
- Le choix final sera scruté au regard de la balance entre compétences techniques, expérience humanitaire, acceptabilité politique au sein de l’ONU et capacité à mobiliser des financements nouveaux.


